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15 décembre 2008 1 15 /12 /décembre /2008 13:34

Aujourd'hui, jeudi 11 décembre, nous avons quitté les îles Testigos ce matin et profitons d'une fenêtre météo favorable pour remonter vers Pointe à Pitre en Guadeloupe. Le vent d'est est faible (<10 nœuds), la mer peu agitée nous marchons au prés serré appuyé par le moteur, nous avons 280 milles à parcourir. La boucle est bouclée, nous quittons le Vénézuela. Mais retour en arrière pour vous parler de notre escapade nautique aux îles Roques.

Samedi 22 novembre, nous quittons sans regret Puerto La Cruz qui vit dans l'effervescence du week-end électoral qui débute. Nous naviguons toujours avec OpSIS de Joseph & Isabelle, avec qui nous avons fait notre excursion de dix jours au SaltoAngel et en Gran Sabana, et Sandy II de Claude & Sylvie qui de leur coté sont allés à Merida dans les Andes puis dans les Llanos. Nous mettons le cap sur l'île de Tortuga distante de 60 milles. Cette île est la destination favorite du week-end des habitants de Caracas et de Puerto La Cruz, les mouillages sont bondés de yachts à moteur autour des quels vrombissent des scooters des mers et des annexes surpuissantes... en clair nous craignons le pire. A notre arrivée en milieu d'après-midi, surprise la Playa Caldera est calme, nous ne sommes que quatre ou cinq voiliers de grande croisière... c'est le week-end électoral, les vénézueliens sont aux urnes ! Le lendemain nous changeons de mouillage et allons sous voiles quelques milles plus loin à Cayo Heradura, les eaux sont limpides le site est sublime... jusqu'au petit matin où nous sommes littéralement attaqués par des nuées de petits moustiques très voraces, c'est insupportable, les impacts se comptent par centaines.

Lundi 24 novembre nous quittons Tortuga à la tombée de la nuit pour parcourir les 90 milles qui nous séparent des Roques où il faut emboucher la passe corallienne de Boca de Sebastopol avec le soleil suffisamment haut pour bien éclairer les hauts fonds. La nuit est agitée comme la mer et le vent instable oscille entre 15-20 nœuds et 30 sous les violents grains de pluie. À 7H15, le lendemain matin le ciel est gris et bas, nous sommes dans les passes quand un violent grain de pluie nous tombe dessus, nous mouillons à l'abri du récif sous un déluge d'eau, en fin de matinée le ciel s'éclaircit un peu et nous avançons dans le lagon pour prendre un mouillage plus agréable à l'abri de l'île Bucchiyaco. Nettoyage, séchage et un bon sommeil réparateur après ce premier contact humide avec les Roques.

Les Îles Roques sont un vaste archipel d'îles et d'îlots bas recouverts de mangrove et partiellement ceinturé d'un atoll corallien. Seule l'île de Gran roque est montagneuse, c'est la seule île habitée. Le paysage est sublime, les eaux claires vont du turquoise au bleu profond, mais peu de faune visible à la notable exception des hordes de moustiques qui nous attaquent matin et soir au lever et au coucher du soleil !

L'avantage de ces îles par rapport aux Antilles... c'est l'absence quasi totale de voiliers de Charter et de location... les mouillages, en semaine, sont souvent déserts. De plus cet archipel, classé parc naturel, en partie non hydrographié (et le positionnement GPS des îles de l'archipel est entaché d'une erreur d'1/2 mille environ !) mesure 25 milles de large sur 15 de haut... il y a de place pour les quelques bateaux présents en majorité des voiliers européens !

Mercredi matin, le beau temps est revenu et nous remontons le lagon sur une quinzaine de milles pour aller mouiller à proximité de Gran Roque à Isla Francisquis. La navigation à vue se fait au moteur entre le récif ceinture de l'extérieur et les bancs et cayes très visibles dans le lagon. On apprend très vite à la couleur de l'eau à estimer les profondeurs, à visualiser les passes et les zones dangereuses. Il faut juste que l'éclairage du soleil soit correct (suffisamment haut et surtout pas de face).

Jeudi matin, le ciel est de nouveau bas et gris, nous en profitons pour aller faire les formalités à Gran Roque : soit deux heures dans quatre bureaux différents qui vous demandent tous les mêmes renseignements, le séjour est limité à 15 jours et une taxe de séjour dans le parc naturel est perçue. La bourgade de Gran Roque est coquette, forte de ses 1200 âmes elle vit du tourisme et de l'exportation des langoustes vers les îles de Bonaire et Curacao. Il y a de très nombreuses Posadas luxueuses avec des patios intérieurs arrangés avec beaucoup de goût. L'aérodrome est minuscule mais il enregistre un trafic important surtout en fin de semaine où il peut même recevoir le petit jet privé d'un riche habitant de Caracas qui rejoint son motor yacht.

Vendredi 28 novembre, avant de quitter Gran Roque nous grimpons à pied au vieux phare qui surplombe le village et le mouillage, d'où le panorama sur Francisquis et les îlots proches est exceptionnel. Une grande heure de moteur plus tard et un peu plus à l'ouest nous arrivons à Noronsqui : trois petits îlots reliés entre eux par des cordons de sable et de corail et protégés de la houle du large par un récif corallien. Avec nos trois voiliers nous sommes les seuls au monde et nous voyons un peu plus loin sur Isla Crasqui des dizaines de grosses vedettes à moteur alignées devant la plage.

Dimanche 30 novembre nous quittons Noronsqui et négocions la passe de sortie du lagon peu profonde et filons toujours vers l'ouest jusqu'à Isla Carenero ; au passage nous voyons les mouillages de Crasqui et Sarqui qui sont très fréquentés le week-end. A Carenero nous sommes au calme devant une mangrove dans un écrin d'eau turquoise. Nous y restons deux jours : visite aux quelques pêcheurs installés dans un campement, baignade, snorkeling sur le tombant, la faune y est assez abondante et le corail vivant est en fleur. Le lendemain, au retour de la pêche, deux barques viennent nous vendre du poisson et de belles langoustes... ce soir : soirée langoustes sur Ramatoa pour les trois équipages.

Mardi 2 décembre, nous quittons Carenero et revenons sur nos pas au mouillage de l'Isla Sarqui, il est à nouveau déserté de tous les plaisanciers bruyants du week-end. Le mercredi soir, nous sommes invités pour l'apéritif à bord d'un catamaran américain et faisons connaissance avec les équipages des trois ou quatre autres voiliers du mouillage.

Jeudi 4 décembre, changement de mouillage, l'ancre tombe dans des eaux cristallines devant une longue plage de sable fin... comme dans les publicités ! Mais toutes les bonnes choses ont une fin et il nous faut déjà penser au retour vers la Guadeloupe, c'est une longue route peu réjouissante contre les vents dominants et contre le courant nord équatorial qui nous attend.

Vendredi 5 décembre passage à nouveau par la case départ de Gran Roque pour y effectuer les formalités de sortie... heureusement plus rapides que celles de l'arrivée et le lendemain matin dès potron minet nous voilà en route vers Isla Margarita. Une route longue de 180 milles que nous couvrirons intégralement en une trentaine d'heures de moteur et avec en prime des trombes d'eau à notre arrivée le lendemain. Nous devions rejoindre directement Porlamar, mais une panne d'alimentation gasoil sur le voilier de Claude & Sylvie et... de notre coté : nous craignons d'être un peu court en carburant et ne voudrions pas tomber en panne sèche. Nous faisons donc une escale technique le dimanche après-midi à Chacachacare, 25 milles avant Porlamar. Nous complétons notre plein avec 70 litres de gasoil payé tout de même 4 Bfs (Bolivar fuerte), c'est à dire 2 euros au cours officiel et moins d'un euro au cours du change parallèle communément pratiqué au Vénézuela (pays qui a instauré un contrôle des changes manifestement très efficace !). Lundi nous repartons avec OpSIS et laissons Sandy II, dans un chantier naval tenu par un Français, réparer son problème de désamorçage du circuit de gasoil. Panne vite réglée car dès le lendemain midi nous les retrouvons au mouillage de Porlamar.

Isla Margarita est la plus grande des îles du Vénézuela, elle est très touristique car elle dispose de belles plages mais aussi de commerces duty-free. Alors naturellement nombre de vénézueliens qui ne peuvent sortir du pays profitent de cette aubaine. Porlamar est une ville champignon un peu glauque avec des buildings, vides actuellement mais qui vont se remplir dès le début des vacances de Noël. Le mouillage est vaste mais pas agréable du tout, c'est une escale technique intéressante car il y a de très grands supermarchés mais c'est aussi un des rares endroits du Vénézuela où il est possible de remplir ses cuves de carburant à un tarif très intéressant (320 litres de gasoil pour 30 euros !). En réalité le trafic est simple : les pêcheurs ont un large volume mensuel (fonction de la taille du bateau et de la puissance du moteur) de gasoil attribué gratuitement par l'état – le surplus est ensuite vendu aux plaisanciers de passage à un tarif intéressant pour tout le monde (pour nous il est quasiment gratuit et eux gagnent des devises étrangères). Le trafic, parfaitement organisé, a pignon sur rue ; le service de livraison à bord est tout à fait remarquable). Car dans ce pays producteur d'or noir... il est interdit de vendre plus de 40 litres par jour de carburants aux bateaux étrangers... peut-être de peur que nous organisions un trafic !


Enfin le mardi 10 décembre, nous récupérons nos papiers et passeports pour quitter officiellement et définitivement le Vénézuela après une dernière escale d'une nuit aux îles Testigos. Nous couvrons les 50 milles de la route Margarita -Testigos au moteur contre un vent faible mais dans le nez et un courant contraire de près de 1 nœud. Nous reprenons nos places au mouillage devant la Playa Tamarindo de « IslaTestigo Grande » et pour se remonter le moral avant l'ultime étape vers Pointe à Pitre... une soirée langoustes à la Casa Verde !

Jeudi 11 décembre, en route pour la Guadeloupe, la météo n'est pas trop défavorable... une première journée au moteur (vent faible et courant traversier assez fort) nous permet de bien gagner dans l'est de la route directe, ce qui nous permet de passer les dernières 24 heures à la voile à une bonne vitesse. Nous couvrons les 295 milles jusqu'aux Saintes en 51 heures et c'est au mouillage de Bourg des Saintes que je termine la rédaction de cet article.

Deux ou trois réflexions en guise de conclusion de ces deux petits mois passés au pays d'Hugo Chavez...

  • Le Vénézuela est un pays où le potentiel touristique est important (paysages grandioses de la Gran Sabana, des Andes, des Llanos et du delta de l'Orénoque, côtes et îles superbes) mais tout cela est finalement peu développé. Les infrastructures médiocres, l'administration envahissante, le cours approximatif du Bolivar et le contrôle des changes sont des freins sérieux à un développement harmonieux du tourisme.

  • Les Vénézueliens sont attachants et très aimables avec les étrangers sans pour autant atteindre le charisme exceptionnel des Brésiliens. La société vénézuelienne possède des traits de caractère particuliers : le culte des concours de miss (une institution nationale), les orchestres de musique classique (politique d'insertion des jeunes défavorisés), les séries tv affligeantes, et les discours fleuves (plusieurs heures en simultanées sur la totalité des chaînes de radio et de télévision) du père de la République Bolivarienne du Vénézuela.

  • Enfin l'insécurité tant relatée dans les forums de voyageurs et de navigateurs est bien réelle même s'il ne faut pas tomber dans une paranoïa excessive. La violence physique (agression armée et meurtre) associée à une délinquance crapuleuse (vol de liquidités et appareils à fortes valeurs commerciales) est quotidienne dans les villes et sur la côte. Par contre les îles que nous avons visitées, à la notable exception de Margarita, ne nous ont pas semblé particulièrement frappées d'insécurité. Cependant nous avons redoublé de vigilance lors de nos sorties dans les villes et avons appliqué une stricte politique de fermeture du bateau, de verrouillage de l'annexe et de son moteur dans tous les mouillages que nous avons pratiqués. A Puerto La Cruz, le lendemain de notre arrivée, un navigateur américain est parti passer la nuit au mouillage dans une île proche de la marina, attaqué par des malfaiteurs il a voulu se défendre et il a été froidement abattu... la vie n'a aucun prix au Vénézuela. Enfin si tout cela vous est insupportable, le mieux est de suivre les recommandations données par le Ministère Français des Affaires Étrangères et de ne pas mettre les pieds dans le pays tant sur terre que sur l'eau !

Nous regagnons prochainement Nantes pour les fêtes de fin d'année que nous passerons en famille..; une fois n'est pas coutume ! Notre prochain article, courant février 2009, vous emmènera à Antigua et Barbuda, deux îles que nous avions délaissées l'année dernière lors de notre périple dans l'arc antillais.


De nouvelles photos ont été ajoutées dans l'album du Vénézuela.


Benoît & Dominique sur Ramatoa rédigé et posté aux Saintes le 15 décembre 2008.




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commentaires

G
Bonjour les Ramatoasistes,Etes-vous toujours à la Guadeloupe ? Nous avons hâte de vous savoir dans le Pacifique, quelle aventure ! Les Galapagos et leurs tortues géantes, vivement des photos.Bon vent et bonne Nav !Francky - Norbert - Marc
M
Encore de belles images de rêves... je vous souhaite une très bonne année 2009 avec le meilleur vent. ML
J
Chers amis,Voyage fabuleux, magnifique cette côte et ces îles du Vénézuela que nous découvrons grâce à vous.Bon et Joyeux Noël en famille Amicalementet Bises à la famille  Les TUCCI 

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