Les cinq jours de l'escale à Dakar sont passées à toute vitesse. Pris dans le tumulte, le bruit, les embarras de la circulation de la capitale sénégalaise, nous ne voyons pas le temps passer et nous ne faisons pas tout ce que nous avons à faire.
Notre éloignement relatif du centre ville complique les choses car pour aller place de l'indépendance depuis le cercle de voile de Dakar à la plage de Hahn il faut compter entre vingt minutes et deux heures en fonction des encombrements.
Le Rallye a aussi ses mondanités !! Nous sommes invités à l'ambassade de France pour un cocktail de bienvenue, cela me donne l'occasion de rencontrer des camarades militaires en poste à Dakar.
Le cercle de voile de Dakar est situé sur la plage de Hahn à proximité d'un petit village de pêcheur et de son marché aux poissons, la plage est toujours animée ... comme les débarquements en annexe quand l'alizé souffle fort et lève un clapot assez creux sur le mouillage.
Pendant notre séjour, nous rencontrerons Ludivine Reungoat et ses trois enfants, Franck son mari est en poste au 23° BIMa sur le camp Bel Air. Ils nous aideront énormément pour faire nos approvisionnements avant de partir sur le Saloum et au retour pour l'avitaillement de la transat.
Nous retrouvons à Dakar les odeurs, les taxis délabrés, les camions hors d'age, les petits commerces, les petits boulots, la crasse et la misère de l'Afrique mais aussi la gentillesse de ses habitants. Dakar est une capitale de 2 à 3 millions d'habitants qui concentre 20% de la population du Sénégal. Il n'y a pas de travail pour tout le monde et il faut bien vivre... c'est le royaume de la débrouille et de l'économie souterraine.
Le lundi 20 novembre, nous participons à un visite organisée du lac Rose à 40 kilomètres au nord de Dakar. Ce lieu mythique de l'arrivée du rallye raid Paris – Dakar est un haut lieu touristique. Pour nous faire oublier les désagréments de notre premier mouillage perturbé par la présence du roi du Maroc, les autorités sénégalaises font les choses en grand pour cette excursion avec la présence d'une escorte pour ouvrir la route à nos deux cars dans les dizaines de kilomètres de bouchons sur la route de Rufisque. Le midi nous sommes invités à déjeuner au campement du Lac Rose où nous dégustons un très bon « poulet yassa ». La visite au lac Rose s'effectue à bord de véhicules 4x4 tout terrain, il s'agit de vieux véhicules militaires français qui vivent là leur cinquième ou sixième vie... ils ne sont plus de première jeunesse et doivent accuser 40 ou 45 ans d'age. Le circuit longe les berges du lac, il traverse un village où est extrait le sel du lac puis nous conduit dans un village Peul (passablement sédentarisé pour les besoins du tourisme !). Le retour au campement s'effectue à travers les dunes de sable et le long de l'immense plage où les concurrents du Paris Dakar achèvent leurs chevauchées fantastiques dans les vagues de l'océan Atlantique.
Depuis le dimanche nous sommes autorisés à mouiller de nouveau devant l'hôtel Terranga et c'est depuis ce mouillage que nous partons dès l'aube pâle vers le Sine Saloum. Cette rivière se situe à 60 milles nautiques au sud de Dakar en allant vers la Casamance. La traversée prend un dizaine d'heures et nous devons impérativement arriver en fin d'après-midi afin de passer la barre d'entrée dans la rivière en convoi derrière une pirogue.
La descente vers le Saloum débute avec du vent, mais à la mi journée il tombe complètement et nous alignons encore quatre ou cinq heures de moteur. Nous naviguons bord à bord avec Opsis, un ovni 435, et en profitons pour faire des photos de nos voiliers sous voiles... voilà donc les premières photos de Ramatoa à la voile... elles sont réussies, notre patience set récompensée. La route directe vers le Saloum passe à 5 ou 10 milles d'une côte basse et sablonneuse, les fonds sont peu profonds, les pirogues se comptent par centaine, les perches de casiers et de filets des pêcheurs sont innombrables... c'est un véritable gymkhana... le même parcours de nuit est impensable. Les pirogues basses sur l'eau sont armées par deux ou trois pêcheurs qui vivent dans un dénuement total sous un soleil implacable. Une pirogue nous demande de l'eau et nous offre un poisson que nous mangerons le lendemain au barbecue... la pêche à la traîne n'a pas été fructueuse... l'honneur est sauf.
La lumière décline déjà quand les 23 voiliers rentrent en file indienne pour franchir les passes et la barre dans les bancs de sable entre Djifere et Sangomar. Ramatoa est en tête du convoi derrière la pirogue qui nous sert de guide. Au coucher du soleil, tous les voiliers sont au mouillage devant le village de pêcheurs de Djifere où nous resterons le mercredi 22 novembre.
Le village de trois à quatre mille âmes entretient une flotte de plusieurs centaines de pirogues, le départ à l'aube et le retour de pêche en fin d'après-midi sont impressionnants. Toute la population s'active à décharger, à trier le poisson et à remonter les pirogues sur le sable. Les poissons sont séchés au soleil sur des séchoirs en bois, les coquillages (des lambis très nombreux en cette saison)sont extraits des coquilles et cuisinés immédiatement. Les conditions de vie ce ces pêcheurs sont précaires, le village ne dispose d'aucune infrastructure, la plage coté océan sert d'exutoire pour les poubelles et les excréments. Coté rivière la plage est occupée par toutes les pirogues remontées sur le haut de la plage et par tous les petits métiers induits par le fruit de la pêche. Au mouillage, sous le vent des séchoirs, nous avons l'impression de vivre dans un flacon de Nuoc-Mam !!
Le jeudi 23 novembre, la flottille se lève tôt et nous remontons le Saloum dès le lever du jour pour bénéficier du courant de flot. Nous avons 24 milles nautiques pour remonter le fleuve jusqu'à Foundiougne, petite ville de brousse. Le parcours tranquille se fait au moteur sur le fleuve large mais encombré de bancs de sable. Nous croisons des pirogues sous voiles, des crevettiers et observons la mangrove toute proche dans les passages resserrés. A l'opposé de Djiffere, Foundiougne est une petite bourgade de brousse, organisée, administrée, propre avec ses marchés et nombreuses boutiques. Elle est installée autour de l'antique bac à chaîne qui traverse le Saloum, large de ½ mille à ce niveau. Le mouillage est d'un calme extraordinaire, les levers et couchers du soleil sur la brousse sont spectaculaires. La chaleur est accablante dès que le vent tombe en début d'après-midi.
Le 24 soir nous changeons de mouillage, redescendons le fleuve sur quelques milles et mouillons en bordure de la mangrove au débouché d'un petit marigot que nous explorons en annexe le lendemain matin. Nous partons à deux annexes dans le bolong jusqu'à un petit village de pêcheur avec quelques pirogues. Nous découvrons la faune et la flore de la mangrove tout au long de la remontée du marigot... un avant goût de l'Amazone... en taille réduite !Nous sommes seuls au monde car tous les voiliers ont quartier libre pour redescendre le Saloum et rejoindre Dakar en toute liberté.
Le samedi 25 novembre soir nous mouillons en bordure de mangrove à quatre ou cinq milles avant l'embouchure du Sine Saloum. La journée de dimanche nous remontons vers Dakar (peu de vent et beaucoup de moteur !), il nous reste quatre jours pour préparer le bateau (avitaillement, pleins de gasoil... etc...) avant le départ de la transat vers Salvador de Bahia au Brésil le 1° décembre. Bernard nous rejoint dans la nuit du 28 au 29, nous l'attendons avec impatience.
Le prochain article sera posté du continent sud américain dans trois à quatre semaines.... un peu de patience... il nous faudra une vingtaine de jour pour traverser vers le Brésil.
De très nombreuses photos de notre balade au Sénégal sont sur l'album de l'étape 03 Cap Vert - Dakar et sur celui de Ramatoa au quotidien.
Benoît & Dominique sur Ramatoa, rédigé et posté à Dakar Sénégal le 28/11/2006.